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En ces temps agités, on lit partout que la stratégie d’une entreprise doit décrire son positionnement sur le long terme, donner une orientation à l’entreprise et formuler des objectifs clairs pour l’atteindre. Mais comment les entreprises peuvent-elles remplir ces conditions si dans un environnement en permanente mutation ? Peut-être est-il nécessaire de changer de perspective.

Les livres et articles de management sur la stratégie et le développement stratégique florissent, et la liste d’ouvrages de qualité sur ce sujet ne cesse de s’allonger d’année en année. Le format de newsletter n’est probablement pas le plus adapté pour porter un jugement définitif sur ce sujet. Cependant, il peut aider à aborder le sujet sous différents angles qui pourront ensuite être approfondis. Les réflexions suivantes vous aideront ainsi à vous interroger sur l’évolution de notre compréhension de l’organisation ces dernières années.

« La structure découle de la stratégie » : il s’agit là d’un concept d’organisation largement répandu et qui est encore aujourd’hui souvent appliqué. Pourtant, Alfred Chandler l’a développé dans les années 1960, alors qu’il étudiait les entreprises ayant connu le plus de succès depuis les années 1920. Depuis, le monde a évolué et il se peut que la recette du succès ait changé.

Depuis cette époque, la stratégie et le développement stratégique sont des compétences qui relèvent du top management, tandis que la mise en œuvre est l’affaire du middle management. Le terme de « management » date d’ailleurs du début du XXème siècle et s’est propagé dans le contexte du développement de la production industrielle de masse. C’est aussi de cette époque que date la répartition traditionnelle des rôles qui a traversé les siècles : « les uns travaillent avec leur tête, les autres avec leurs mains ». Mais entre-temps le secteur des services a pris une part de plus en plus importante dans le PIB et le terme d’« économie de la connaissance » s’est répandu. La séparation initiale des tâches est alors en grande partie devenue obsolète. N’est-ce pas intéressant de voir parfois comme il est difficile de trouver une alternative au mot « manager » ?

Dans le monde professionnel, on utilise des termes comme « archives », « dossiers » ou « classeurs ». Ces termes se réfèrent à la gestion de documents et nous ramènent à une époque antérieure à l’invention de l’ordinateur. Même à l’époque de l’informatique, ces termes imagés n’ont que peu changé. Aujourd’hui encore, il ne se passe pas un jour sans que nous nous agacions que des documents soient perdus ou que les chemins d’accès à certains fichiers soient compliqués.

Ces exemples trahissent le fait que nous sommes toujours enfermés dans une structure de pensée datant du XXème siècle. Dans le même temps, nous cherchons à développer et à mettre en œuvre des stratégies qui doivent nous assurer une croissance rentable à l’avenir.

Concevoir un positionnement durable

Qu’est-ce qui constitue donc un travail stratégique de qualité ? Pour nous, quatre composantes sont essentielles :

En principe, la stratégie d’entreprise doit donner une idée claire d’un état-cible à atteindre et ainsi fonctionner comme un axe d’orientation sur lequel chaque décision doit s’aligner. Peter Drucker parle d’une conception proactive du futur, en opposition avec l’idée de réagir à un environnement concurrentiel qui évolue de lui-même.

Dans ce cadre, les valeurs et les normes de l’entreprise jouent un rôle immanent. Elles construisent les principes avec lesquels la stratégie pourra être entièrement mise en œuvre. Elles créent le cadre dans lequel l’engagement et la confiance sont générés et construisent ainsi les éléments indispensables à la conception de la future organisation.

La définition et le développement des compétences stratégiques constituent le fondement des avantages concurrentiels sur le marché. Ils définissent pourquoi une entreprise peut mieux faire telle chose qu’une entreprise concurrente. L’entreprise se concentre alors sur ses points forts. Une bonne connaissance des compétences stratégiques d’une entreprise est nécessaire pour appuyer leur développement.

Toutefois le secret du succès réside dans la prise de conscience du problème à résoudre. Qu’est-ce qui facilite suffisamment la vie de votre client pour qu’il ait envie de recourir à vos produits ou vos services ? Le développement de la solution appropriée qui saura convaincre votre client requiert une connaissance exacte de la situation des clients individuels et de leurs besoins ou problèmes, souvent même inexprimés. Pour rester dans le même registre : on prend souvent comme exemple dans ce contexte le fait qu’un client veuille obtenir un trou dans son mur, pas qu’il veuille une perceuse. Clayton Christensen parle alors d’être embauché pour réaliser un travail (« hired for a job to be done »), pas pour fournir un bien ou un service spécifique.

Comme vous avez pu le remarquer, il n’a pas été question jusqu’ici, par exemple, d’EBIT, de Cost-Income-Ratio ou de ROCE. C’est plutôt l’émergence d’une idée différenciante qui est déterminante, cette idée à laquelle une organisation peut s’identifier et qui repose sur la mise en application des principes de conception communs à l’organisation. Les quatre composantes énoncées précédemment déterminent le but de l’organisation et définissent ainsi son noyau dur. Ils commandent la conception de la stratégie. Simon Sinek parle ici du « pourquoi ».

En y regardant de plus près, tout ceci est plus facile à dire qu’à faire !

Quel est le lien entre la stratégie et l’organisation ?

Le business model opérationnalise la logique stratégique de l’entreprise et met en relation les revenus et les coûts. Les business models sont souvent constitués de trois éléments : la proposition de valeur (« quel est le bénéfice ? »), la chaîne de création de valeur (« qui est impliqué ? ») et l’équilibre des risques (« quel est le risque économique ? »). Ces trois éléments forment le modèle de revenus, c’est-à-dire la façon dont l’entreprise gagne de l’argent.

Mais il ne faut pas en conclure qu’une entreprise ne dispose que d’un business model. Au contraire, des produits et/ou services différents exigent parfois d’avoir un accès au marché différencié. La combinaison des trois éléments détermine s’il est nécessaire de créer un nouveau business model.

La stabilité du business model est souhaitable afin qu’il assure des flux de revenus durables. On reconnaît les business models stables avant tout en ce qu’ils intègrent le client dans un système de bénéfices tel qu’il devient peu probable que le client veuille changer de fournisseur. Dans le même temps, on optimise l’équilibre des risques de sorte que les ventes et les investissements puissent agir indépendamment dans le temps. La chaîne de création de valeur répartit le risque sur le réseau de partenaires et crée des structures de coûts optimales.

L’exemple suivant, choisi volontairement en dehors de la branche des technologies, explicite ces interdépendances : en proposant un système de bénéfices complet avec un haut niveau de disponibilité (maintenance full-service) pour des coûts de production faibles (construction intégrée de turbines), la branche Énergie éolienne de Siemens vendait toute une flotte d’éoliennes offshore qui se trouvait encore en phase de développement. Ainsi, Siemens a endossé une grande partie des risques économiques, mais en faisant cela, il a pu financer ses énormes coûts de développement. Des structurés équilibrées en supply chain et logistique ont aussi permis de maintenir la base de coûts proportionnelle dans la phase de développement de l’activité. Avec ce business model, Siemens a réussi à s’installer à long terme sur le marché en tant que leader.

« No one is an island »

Cependant, la stabilité d’un business model reste une utopie. Au contraire, la société de l’information dans laquelle nous vivons voit apparaître non seulement des possibilités technologiques vastes concernant l’utilisation des données, mais aussi un comportement consommateur beaucoup plus actif qu’auparavant. L’idée selon laquelle l’essentiel de l’interaction avec ses clients peut être contrôlé par un Customer Relationship Management n’est plus d’actualité. La relation client fonctionne bien plus sur un mode de Supplier Relationship Management, les clients étant aujourd’hui bien plus informés qu’il y a 20 ans.

Les réseaux de partenaires appartenant à la chaîne de valeur contribuent eux aussi à la complexité du business model. Au début du XVIIème siècle déjà, John Donne explicitait, avec sa phrase « Aucun homme n’est une île », l’idée que chaque action a une conséquence sur le monde extérieur et les autres acteurs. De même, les relations entre les éléments d’un business model sont exposées à un changement permanent. Elles requièrent une certaine attention et la capacité à prendre rapidement des décisions. Donc tandis que le noyau dur de la stratégie doit rester stable sur la durée, les business models sont eux bien plus volatiles.

Pour gagner des parts de marché, il faut donc continuellement améliorer le business model opérationnel. Quoi de mieux alors que de transférer le pouvoir de décision dans ce domaine à ceux qui possèdent des informations détaillées et peuvent en tirer au mieux les conséquences ?

L’innovation comme moteur de l’évolution du business model

Les business models qui ont réussi constituent un grand danger. Ils sont parfois des freins à l’innovation ou peuvent empêcher d’effectuer un changement essentiel à un moment donné. Les coûts liés à ces opportunités manquées augmentent alors de façon exponentielle ou dépassent même de très loin les bénéfices attendus.

À l’avenir, les phases de transformation que nous vivons actuellement dans le cadre de la digitalisation se raccourciront et se dérouleront de façon bien plus radicale. Le passé récent a été marqué plutôt par une volonté de comprendre que par un sentiment de devoir agir. Cette phase touche à sa fin ; nous entrons dans une époque où ce n’est plus la gestion des coûts mais la capacité d’innovation qui devient déterminante.

Il deviendra d’autant plus important de recentrer le management sur l’élaboration d’innovations de produits ou de business models (« Explore »). Dans ce cadre, le lien avec une stratégie d’ensemble est central. En particulier, le développement de compétences stratégiques et la réponse à la question « quel travail doit être réalisé » sont des éléments déterminants de la capacité d’innovation d’une entreprise.

La responsabilité des business models établis (« Exploit ») doit être placée autant que possible du côté client, et ce sous la forme de réseaux extrêmement flexibles s’organisant par eux-mêmes. Ils doivent être en mesure de répondre rapidement à de nouvelles exigences, de les intégrer au business model en place et de les adapter à la chaîne de création de valeur.

 

Compréhension de l’organisation au XXIème siècle

Alors que les cycles d’organisation duraient de 20 à 30 ans au milieu du XXème siècle, leur durée s’est réduite à environ 7 ans dans les années 1990. Aujourd’hui, nous nous trouvons dans un contexte de changement permanent des organisations. La durée d’une organisation est en quelque sorte mesurée par la durée d’une phase de transformation.

Il est alors d’autant plus important d’avoir un noyau dur stable qui donne une orientation et reflète la nature de l’organisation. Il est l’élément fondamental de différenciation de l’entreprise et le point de départ de toutes les réflexions stratégiques.

La phrase « La structure découle de la stratégie » doit donc être élargie et reformulée en « La structure découle du business model qui découle de la stratégie ». Comme les business models ont tendance à fonctionner sur des cycles de plus en plus courts, la structure de l’organisation doit s’adapter à ces nouvelles conditions.

Avec cela, la compréhension des rôles du management évolue. En particulier, le transfert des pouvoirs décisionnels vers des équipes auto-gérées implique de renoncer clairement à l’image traditionnelle du manager.

La capacité d’innovation, surtout pour créer des business models entièrement nouveaux, représente un paramètre essentiel du développement des organisations au XXIème siècle. Les décideurs ont alors la mission de lier la capacité d’innovation de l’organisation avec son cœur stratégique et en même temps de créer un réseau organisationnel qui lie l’« Explore » et l’« Exploit ».

 

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